Trésors engloutis d'Egypte
Paris, Grand Palais, jusqu'au 16 mars 2007
C'est à une véritable résurrection que nous convie l'exposition organisée au Grand Palais pour présenter au public le produit des fouilles sous-marines entreprises depuis 1996 au large d'Alexandrie et en baie d'Aboukir par Franck Goddio, petit fils du navigateur Eric de Bisschop. Soutenu par Jean Yoyotte, professeur honoraire au Collège de France, il a su intéresser des mécènes privés au financement de recherches de grande envergure mobilisant des équipes de spécialistes nombreuses et bénéficiant du soutien précieux du Commissariat à l'Energie Atomique, qui a fourni des moyens de détection magnétométrique particulièrement performants. Le résultat est impressionnant. C'est tout un pan de l'histoire égyptienne trop longtemps sous-estimé qui est ainsi ramené au jour. Les restes d'Alexandrie et de plusieurs cités littorales ravagées à la fin de l'Antiquité par des séismes et un violent raz-de-marée – 489 statues, pièces et objets divers – initialement présentés à Berlin font revivre cette Egypte hellénistique et romaine qui, née de la fusion de l'héritage pharaonique et des apports grecs et orientaux, constituait alors l'un des principaux centres de gravité du monde méditerranéen. Trois statues de granit rose, hautes chacune de cinq mètres – un roi d'Egypte figé dans l'attitude de la marche, entouré d'une reine figurée en Isis et du dieu du Nil Hapy – accueillent le visiteur. Elles proviennent du temple d'Herakleion (Thönis), une cité dont les ruines sont totalement immergées à sept kilomètres du rivage actuel. Ville prospère, dont la fondation était antérieure à celle d'Alexandrie, elle fut submergée par les eaux et ses vestiges recouverts par les limons apportés par le Nil. On y a retrouvé les ruines du temple dédié à Amon et à son fils Khonsou, que les Grecs assimilaient à Héraclès. C'est dans la baie d'Aboukir qu'a été identifié un gigantesque sanctuaire dédié à Sérapis, à proximité duquel on a découvert, à Canope (la Pegouti des Egyptiens), une superbe statue d'Arsinoé II sculptée dans le granit noir et figurée comme une Aphrodite dont la tunique mouillée signifie qu'elle sort des eaux. Miraculeusement reconstitué en plusieurs étapes à la faveur de découvertes successives qui doivent beaucoup au hasard, le « naos des décades » réalisé dans la première moitié du IVe siècle avant notre ère sous le règne de Nectanébo, est l'une des pièces les plus impressionnantes de l'ensemble dans la mesure où il nous présente un étonnant calendrier, identifié par les périodes de dix jours figurées sur ses parois extérieures. Les fouilles ont également permis de reconstituer un panorama complet du Grand Port d'Alexandrie. Faut-il préciser que l'exposition ne présente qu'une faible part des trouvailles réalisées et que les espaces à prospecter demeurent immenses… Cette manifestation, exceptionnelle par la richesse des objets présentés et par l'ampleur des moyens qu'ont mobilisés les recherches effectuées en amont, n'en lève pas moins le voile sur l'une des périodes les plus riches de l'histoire antique.