L'archéologie préventive rattrapée
par les délais LE MONDE | 21.02.09 |
14h53 • Mis à jour le 21.02.09 | 14h53 L'archéologie préventive va-t-elle faire les frais du plan
de relance du gouvernement ? En cause, la loi "pour l'accélération des
programmes de construction et d'investissement publics et privés",
définitivement adoptée, mardi 17 février, qui fait l'objet de critiques dans la
communauté archéologique et dans les rangs de l'opposition. Avant tous travaux de construction - logements, routes, voies ferrées,
etc. - l'aménageur doit faire procéder, sur le site choisi, à un diagnostic
archéologique suivi, si besoin, de fouilles en bonne et due forme. Ensuite,
seulement, les travaux de construction peuvent commencer. La nouvelle loi
dispose que les archéologues auront quatre mois pour engager les travaux
nécessaires au diagnostic. Ensuite, dès l'obtention de l'autorisation de
procéder aux fouilles, ils auront six mois pour engager celles-ci et douze mois
de travail (prorogeables une fois) avant que le béton ne soit coulé. "Ces délais sont très contraignants, en
particulier pour la réalisation des diagnostics, estime Patrick
Bloche, député (PS) de Paris. Or s'ils ne
sont pas respectés, les aménagements pourront avoir lieu et, de fait, le feu
vert sera donné à la destruction de vestiges archéologiques." L'instauration de ces délais n'est pas surprenante. De longue date, élus
locaux et aménageurs se disent ulcérés par la lenteur avec laquelle l'Institut
national de recherches archéologiques préventives (Inrap) pose ses diagnostics
et conduit ses excavations. Jusqu'à présent aucun délai n'était fixé par la
loi. "Nous avons conscience des
désagréments causés par les délais parfois importants, dit Nicole
Pot, directrice générale de l'Inrap. Mais nos moyens, en particulier humains, ne sont pas
déterminés par notre niveau d'activité." Pour l'Inrap, les
années à venir sont donc périlleuses. Il sera ainsi confronté à ces nouveaux
délais et à un surcroît d'activité généré par la relance. La loi du 17 février
en tient compte. Elle prévoit un relèvement de la redevance pour l'archéologie
préventive (RAP) acquittée par les aménageurs. Cette revalorisation devrait
assurer 10 à 15 millions d'euros annuels supplémentaires à l'Inrap. A quoi
s'ajoutent, pour 2009, 20 millions d'euros promis par le ministre Patrick
Devedjian, ponctionnés sur le budget du plan
de relance. Cette rallonge satisfait la direction de l'Inrap et devrait permettre de
passer l'année 2009 dans de bonnes conditions, en dépit du regain d'activité
qui sera généré par le plan de relance. Mais elle ne règle pas dans la durée le
problème structurel d'un institut qui, depuis sa création, voilà moins de dix
ans, "se trouve dans une situation de
précarité budgétaire de tous les instants", selon M. Bloche. "On n'a jamais trouvé la bonne solution, les
lois se succèdent mais ne règlent pas ce problème : il n'y a pas assez de
ressources pour faire de l'archéologie préventive partout où il faudrait
fouiller", renchérit M. Gaillard. En 2003, les parlementaires avaient cru régler le problème en recourant
au marché. Depuis quatre ans, les fouilles d'urgence sont ouvertes à la
concurrence : de petites sociétés privées - il en existerait entre dix et une
vingtaine selon les sources - se sont créées pour entrer en concurrence avec
l'Inrap. "Avec la nouvelle loi, il y a
beaucoup de craintes que les aménageurs choisissent de préférence ces petites
structures au détriment de l'Inrap, en misant sur leur incapacité à tenir les
délais", dit un archéologue de l'institut. Ces soupçons sont
alimentés par l'absence de centralisation des données liées à cette activité
archéologique privée. Sollicités par Le
Monde, les services du ministère de la culture se révèlent ainsi
incapables d'évaluer le nombre et la nature des fouilles archéologiques menées
par ces entreprises. "Cette histoire de délai est un coup d'épée dans
l'eau", tempère pour sa part Yann
Gaillard, sénateur (UMP) de l'Aube, peu
suspect d'hostilité envers l'archéologie préventive. De fait, les décrets
d'application du nouveau texte devront en rendre conformes les dispositions
avec les sanctions pénales - jusqu'à 100 000 euros d'amende et sept ans
d'emprisonnement - prévues en cas de destruction intentionnelle d'un site
archéologique... Une délocalisation
contestée par le Collège de France Décembre 2011 : à cette date, le siège parisien de
l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) devrait
avoir été délocalisé à Reims (Champagne), pour combler l'un des
"trous" ouverts par la réforme de la carte militaire. Environ cent
trente agents sont concernés, dont une grande part pourraient quitter
l'Institut, encore jeune. Dans un texte diffusé sur Internet, Yves Coppens,
Christian Goudineau, John Scheid et Jean Guilaine, professeurs au Collège de
France, expriment leur "incompréhension" et leur
"réprobation" face à la décision du gouvernement. "Si les
ministères de tutelle veulent délocaliser certains de leurs services ou
établissements, qu'ils ne s'en prennent pas aux plus jeunes, aux plus fragiles,
aux plus susceptibles d'être "cassés"", écrivent-ils. Stéphane Foucart |
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